mercredi 27 mai 2009

Paranoïa bénédictine

Bernard Lamarche-Vadel n’aime pas ce qui peut aisément se nommer. Ainsi, il invente le terme de « paranoïa bénédictine ». Cet oxymoron (figure de style accouplant deux contraires : une apathie flamboyante) caractérise l’état d’esprit qui guide Bernard Lamarche-Vadel pour figurer son propre « Musée Imaginaire ». La paranoïa bénédictine c’est le verbe de Dali et les silences de Degottex. Le portrait paillette de Joseph Beuys par Andy Warhol (œuvre acquise par B. L.-V.) en est la figure de proue.

La revue Artistes est la tribune par laquelle Bernard Lamarche-Vadel va littéralement prendre la parole (Bernard nous lisait ses textes avant publication, ils fallaient que ceux-ci soient audibles) et pouvoir librement exprimer ces multiples passions.

« L’art aujourd’hui représente trop souvent l’ultime réconciliation frileuse de la foire des idéologies et des nécessités du commerce. Entre les volontés névrotiques de fixer une ligne et de faire le point, c’est l’énergie démesurée, la concentration tourbillonnaire, l’éloignement, les vitesses contradictoires, le risque de se tromper, qui sont purement exclus » (Bernard Lamarche-Vadel, Artistes n°2, déc. 79 – janv. 80).

De l’Abstraction Analytique à Finir en beauté (j’aime imaginer la photo de Joseph Beuys balayant la place Karl Marx augurant l’exposition Finir en beauté), de Gérard Gasiowroski à Helmut Newton, de Hucleux à Klossowski, Bernard Lamarche-Vadel prend tous les risques.

L’éditorial du numéro 4 d’Artistes se résume à la citation de deux phrases :
« Si votre toile est blanche, commencez par le ton le plus vigoureux. Suivez l’ordre jusqu’au ton le plus clair. Il est très peu logique de commencer par le ciel. » Corot.
« … Comme indication, je commence toujours une toile par le ciel. » Sisley.
Cet éditorial célèbre les noces des paradoxes, l’accouplement des sentiments contraires, la contradiction comme matrice d’énergie.

La posture intellectuelle de Bernard Lamarche-Vadel, volontaire et provocatrice, s’apparente à celle d’un Duchamp ou d’un Picabia.
Par son verbe virulent, il rejoint le radicalisme d’un Jean Dubuffet qui publie en 1968 « Asphyxiante Culture », fustige l’art officiel et ses « enculturés ».
Par son engagement total, il se situe sur la même ligne qu’un Pierre Restany, lequel écrit en 1978 son Manifeste du Rio Negro, du naturalisme intégral : « Le naturalisme comme discipline de la pensée et de la conscience perceptive est un programme ambitieux et exigeant, qui dépasse de loin les perspectives écologiques actuellement balbutiantes. Il s'agit de lutter beaucoup plus contre la pollution subjective que contre la pollution objective, la pollution des sens et du cerveau, beaucoup plus que celle de l'air ou de l'eau. »

« Tout nait sans raison, … et meurt par rencontre. » écrit Sartre. Bernard Lamarche-Vadel trace des parallèles entre des univers qui nous semblent opposés. En fait il dessine la carte d’une géographie culturelle élargie.
La passion amène Bernard Lamarche-Vadel à embrasser la culture dans toute sa diversité, à la vivre dans tous ses excès.
Aujourd’hui encore, rares sont les critiques d’art à avoir une telle liberté d’esprit et de ton, à prendre tous les risques y compris celui de se tromper.
Personne parmi ses contemporains ne sait mieux que lui interpréter cette figure du « grand écart » qui fait de lui le Rudolf Noureyev de la critique d’art. Hervé Perdriolle

Dans l'oeil du critique - Bernard Lamarche-Vadel et les artistes
Du 29 mai au 6 septembre 2009, Musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 11 avenue du Président Wilson, 75116 Paris

De Finir en Beauté à la Figuration Libre :
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Revue Artistes, maquettes et projets :
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